Chap. 5. La plus belle.
Il fait bon dans l’atelier.
Une douce lumière matinale y pénètre par les baies du nord. Les deux grandes baies du sud sont occultées par d’épais rideaux. Une odeur de café frais couvre à peine les senteurs de térébenthine. Depuis plus de deux heures Marc est au travail !
Je suis nue, couchée sur une large sellette dans une pose des plus indécentes. Ma peau est brûlante sous le projecteur à la lumière crue. Matière malléable à sa merci réagissant aux moindres de ses sollicitations, de ses désirs. Comme une marionnette docile il me manipule selon son bon vouloir !
Un bras qui se tend, des reins qui se cambrent, des cuisses qui s’écartent ou se referment, voluptueuse ou pudique selon l’instant. Muse lascive et soumise. En cet instant nul besoin de collier. D’ailleurs il a exigé que je sois totalement nue, sans aucun bijou, sans aucun artifice pas même un trait de Rimmel.
Nue comme au jour de ma naissance. De temps à autre le crépitement de l’appareil photographique s’interrompt. L’artiste plonge alors dans une réflexion intense que rien ne peut troubler, pas même la musique énigmatique de Dark Sanctuary qui nous sert de toile de fond sonore. Patiente, docile, j’attends alors qu’il revienne à moi, frémissante, attentive aux prochaines sollicitations qui ne vont pas tarder. Quelque fois il me sourit et s’enquière de mon bien être, me demande si cela va bien. Une inquiétude inconcevable à mes oreilles, Lui, Mon Maître, redevient alors l’Artiste prévenant, avec même, suprême étonnement, des mots d’encouragement pour les poses les plus difficiles. Celles qui tendent les muscles à l’extrême et désarticulent les jointures. Et qui souvent finissent dans des éclats de rires incoercibles tant la douleur est insupportable. Mais pour lui je suis prête à tout subir.
Souvent sa main s’égare, effleure ma peau, s’attarde sur un sein pour en tendre le mamelon, vient flatter une cuisse, explorer mon ventre et mon nombril, les globes de mes fesses, fouiller mes cheveux odorants et caresser ma nuque.
Je suis bien ! Offerte et désirable, je suis bien !
Comme l’argile malléable entre les mains brûlantes du suprême sculpteur je n’ai qu’à me laisser porter, à me plier, à me soumettre à sa puissante volonté.
Je sais qu’une alchimie mystérieuse est en train d’opérer. Il va faire de la petite étudiante au teint pâle, presque falote, de cette fille que l’on croise dans la rue sans se retourner, sans même s’apercevoir qu’elle existe. Il va faire d’elle une Reine, un être de feu et de flammes. Une œuvre qui allumera dans les yeux des hommes les lumières des pensées impures, et enflammera leurs cœurs. Une œuvre offerte au monde que personne ne pourra s’empêcher d’admirer.
Il va faire de moi… La plus Belle.